Entretien avec Patrice Le Fel, président de l’interprofession du port de Lorient.
Un contrat de réparation navale a échappé à Lorient, ces derniers jours, pourquoi ?
Un caboteur s’est dernièrement présenté à Kergroise. Il avait besoin d’aller en cale sèche, pour une réparation. L’armateur s’est tourné vers nous. L’interprofession s’est immédiatement mobilisée, a alerté DCNS qui a joué le jeu pour nous aider à remporter le marché en mettant à disposition un de ses bassins.
Pourquoi le marché ne s’est-il pas concrétisé ?
Nous étions trop chers. Pas en prestations de services, mais en terme de cale sèche. Malgré les efforts de DCNS, l’opération pesait 40 % du devis. Car pour l’instant, ce bassin non automatisé nécessite des frais de halage, de remorquage pour rentrer et sortir un bateau. Ce caboteur est donc parti ailleurs. Un cas similaire s’est produit l’an dernier. Un navire de commerce changeait d’armateur. Il était en escale à Lorient. Pour les expertises, il fallait le mettre au sec. Impossible ici. Du coup le bateau est reparti à vide, dans un port du nord de l’Europe, pour accomplir la manœuvre…
La mise à disposition d’un bassin est plus que vitale pour vous aujourd’hui ?
Cela a été promis depuis plus de 10 ans, par les collectivités. On ne veut plus attendre. D’autant qu’en ce moment l’interprofession de Lorient est candidate pour la refonte du(ancien chalutier transformé en yacht de luxe, qui vient d’être racheté. Nous ne sommes pas les seuls sur les rangs. Nous n’aimerions pas que ce bateau arrivé et restauré à Lorient, et qui a besoin aujourd’hui d’être révisé au niveau de la coque et de la motorisation, parte en remorque vers un autre port qui dispose lui, des outils nécessaires.
Qui peut faire bouger les choses ?
Le dossier est entre les mains de la Région. Il faut 6 millions d’euros pour automatiser le bassin numéro 2 de DCNS et être en concurrence loyale avec les autres navales bretonnes. Ce bassin aurait un gestionnaire privé, avec un cahier des charges précis. DCNS conserverait en outre des droits dessus en fonction de son plan de charge. Les discussions vont dans le bon sens avec le groupe de construction navale. Mais le financement manque. Nous sommes un tissu de PME. On n’a pas les moyens d’assumer un tel investissement.
Si vous ne disposez pas de cet outil, quel avenir pour la profession ?
Nous craignons le pire d’ici deux ans. On se bat ensemble, au sein de l’interprofession, pour conquérir des marchés. Le fait que nous nous soyons fédérés commence à avoir des retombées concrètes sur les prises de marché. Nous disposons certes d’un gros élévateur à bateaux de 650 tonnes. Mais les ports de Brest songent à s’équiper d’élévateurs d’ici 2 015 (N.D.L.R. : lire ci dessous). Si un armateur a besoin de faire réaliser un entretien ou une réparation de plusieurs de ses bateaux, ce sera plus facile pour lui d’aller vers des structures qui disposent d’outils complémentaires.
L’interprofession lorientaise voit-elle Concarneau et Brest comme des concurrents dangereux ?
Nous nous refusons à nous positionner comme des concurrents. Nos entreprises se déplacent d’ailleurs sur ces deux sites et vice-versa. Mais nous pensons qu’il faut tous renforcer nos moyens pour garder un pôle fort de réparation navale en Bretagne. Car ailleurs, comme dans le Nord ou en Charente, on commence aussi sérieusement à s’organiser dans le domaine.
Matinales sur la navale : Ce jeudi 14 février, organisé par l’agence de développement économique. De 8 h 30 à 10 h. Celtic Submarine, rue d’Estienne d’Orves.